L’art de ne pas dire, la manipulation expliquée par Clément Viktorovitch

Dans la continuité de son livre Le pouvoir rhétorique, le politologue Clément Viktorovitch offre un seul-en-scène étonnant à la croisée du stand-up et du cours magistral. Dans l’art de ne pas dire, il dévoile les secrets d’un conseiller politique prêt à tout pour mener son candidat vers la victoire suprême. Un spectacle didactique, intelligent et plus que moderne.

Scandale capillaire

Toute ressemblance avec la réalité est bien évidemment fortuite. Ici, il n’y a ni pays ni époque. Les candidats sont anonymes. La scène aux allures d’une agora, est relativement neutre. Seuls président quelques drapeaux blancs suspendus, laissant libre court à notre imagination. Mais rien n’est pourtant laissé au hasard, et on n’en attendait pas moins d’un spécialiste du langage politique. Clément Viktorovitch démarre en incarnant son personnage de fiction, un conseiller politique viré à la suite d’un scandale médiatique impliquant des frais capillaires jugés trop élevés. C’est pourtant lui qui a mené son candidat jusqu’à l’élection suprême, mais la politique ne pardonne pas. 

L’art de la métamorphose 

Dans un exposé proche d’un cours en amphithéâtre, Clément Viktorovitch décrit avec brio tous les procédés symboliques, sémantiques et linguistiques indispensable à l’acceptation d’un candidat par le peuple. Un physique irréprochable est de rigueur : adieu les cravates, bonjour la barbe bien taillée. Puis, bien avant de parler programme, parlons communication. L’exercice du discours est ici décortiqué avec la salle : des phrases vides, des contre-sens, des généralités, l’utilisation de la peur et de l’espoir. Et surtout, le plus important : la péroraison (synonyme de conclusion mais qui justifie les honoraires d’un communicant). Un discours ne laisse rien au hasard, au même titre qu’un slogan, que le nom d’un mouvement ou que la couleur d’une cravate. C’est ce que démontre ce conseiller fictif non sans faire rire (parfois un peu jaune) cette salle comble.  

« Parce que Clément Viktorovitch connaît et dénonce les procédés rhétoriques utilisés pour manipuler un auditoire, il est le mieux placé pour incarner, sur scène, celui qui les utilises à ses fins » précise le metteur en scène. Ce métier pour lui, c’est l’art de la métamorphose : savoir manipuler avec méticulosité et sans scrupule.

C’est un spectacle interactif, passionnant et résolument actuel. Un passage obligatoire de ce off 2024. 

L’art de ne pas dire – Clément Viktorovitch
Jusqu’au 21 juillet à 19h05 Salle Tomasi / La Factory
Festival off Avignon 2024 

A partir de fin septembre au Théâtre Saint-Georges à Paris 

 

Written by CharlotteHenry
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