The Servant : un ténébreux jeu de domination
Lieu : Studio des Champs-Elysées
Dates : jusqu’au 3 juillet
Mise en scène : Thierry Harcourt
Avec : Maxime d’Aboville, Roxane Bret, Xavier Lafitte, Adrien Melin, Alexie Ribes, Juliette Petiot
Marionnettes et tourbillon machiavélique
Maxime d’Aboville mérite bien son Molière (meilleur comédien dans un spectacle du théâtre privé en 2015). Dans cette incroyable course à la domination, le comédien se surpasse. La pièce mise en scène par Thierry Harcourt, adaptation d’un scénario d’Harold Pinter (lui-même inspiré du roman de Robin Maugham) avait déjà été proposée au cinéma en 1963. Tout se déroule dans un intérieur bourgeois, immense demeure londonienne appartenant au jeune aristocrate Tony. Lorsque Tony décide d’engager, pour les tâches ménagères et du quotidien, l’étrange et mystérieux Hugo Barrett, celui-ci s’avère être un personnage tout particulier. Méticuleux, psychorigide et doté d’une finesse d’esprit à en décrypter les mots-croisés du Times, Barrett noue rapidement une curieuse relation avec son maître Tony. Il est aux petits soins avec son maître, lui décore son intérieur et lui tient compagnie de jour comme de nuit. Jusqu’à susciter la jalousie de Sally, la fiancée de Tony, et l’inquiétude de son meilleur ami Richard. Relation amoureuse ? Peut-être. Amitié malsaine ? Pourquoi pas. Toutes les hypothèses sont soulevées et le jeu ténébreux et dérangeant de Maxime d’Aboville (Barrett) fait trembler. Plus la pièce avance, et plus Barrett semble posséder Tony. Rapidement, il lui propose d’embaucher sa nièce Vera pour l’épauler dans les tâches du quotidien dans la maison. S’en suit un espèce de ménage à trois dont on ne pouvait se douter. Ce tourbillon machiavélique n’a d’égal au théâtre et le public est captivé. Très vite, le domestique dépasse le maître, le domine. C’est à ce jeu de marionnettes incessant que se risquent les personnages troublés de The Servant.
Sur le casting, il n’y a aucune erreur : dans une incarnation parfaite de son personnage Barrett, d’Aboville excelle. Xavier Lafitte est totalement séduisant, Alexie Ribes excellente dans son rôle de femme désemparée. Adrien Melin est parfait comme meilleur ami et Roxanne Bret délicieuse en jeune domestique insouciante.
Dans cette mise en scène de Thierry Harcourt, il n’y a aucun faux pas. Seule la fin laisse le spectateur (peut-être volontairement) sur sa faim. Brutale, dérangeante, on sort de cette pièce étrangement questionné, mais conquis.
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