La Ménagerie de verre : souvenirs poétiques au Poche-Montparnasse
Premier succès public de Tennessee Williams et oeuvre en partie autobiographique, La Ménagerie de verre raconte le fragile équilibre d’une famille modeste dans les années 30. Un père soudainement disparu, une mère nostalgique et trop dévouée à ses enfants, un fils ouvrier et célibataire et une fille infirme dont la seule obsession est une collection d’animaux en verre. Un soir, l’espoir frappe pourtant à leur porte…
Transcendante
Amanda (Cristiana Reali) fait de son mieux pour prendre soin de ses enfants, qu’elle materne un peu trop. De sa vie détruite par le départ de son mari, elle essaie de recoller les quelques morceaux. Elle voit dans ses enfants l’espoir de reconstruire ce qu’elle n’a jamais pu avoir. Son fils Tom (Charles Templon) vit d’éprouvantes et mécaniques journées à l’usine. Il fuit sa propre réalité en filant chaque soir au cinéma, évitant ainsi de multiples disputes avec sa mère. Laura, la fille, souffre d’une malformation qui l’empêche de marcher normalement. Marginale, hypersensible et timide à l’extrême, Laura vit dans un monde à elle, admirant ce qui lui est le plus cher : une collection d’animaux que sa mère appelle sa « ménagerie de verre ». Dans ce rôle, Ophelia Kolb est transcendante.
Amanda rêve que sa fille se marie avec un gentleman de bonne famille. Son rêve prend forme lorsque Jim (l’excellent Félix Beaupérin), un ancien ami de lycée et l’amoureux de Laura, s’invite à dîner chez eux. S’en suit une soirée hors du temps pour toute la famille.
Personnages brisés
Comme les fragiles chevaux de cristal que Laura collectionne, les personnages de Tennessee Williams sont brisés par le temps. Chacun se raccroche à une réalité qui est la sienne, projetant ses propres fantasmes ou regrettant un passé révolu.
Dans une mise en scène très poétique, Charlotte Rondelez transporte le spectateur dans un univers à mi-chemin entre le rêve et la réalité. Ainsi, elle matérialise par des jeux de lumière et de musique, ce qui relève du présent et du souvenir. La musique a d’ailleurs une place privilégiée dans cette pièce, elle « simplifie parfois la compréhension des non-dits, elle met un voile de couleur sur les souvenirs » précise la metteur en scène. Elle a d’autant plus d’importance que Laura, en plus de ses animaux de verre, échappe au monde qui l’entoure grâce à son vieux tourne-disque. Brillant exercice de mise en scène. La Ménagerie de verre est un texte fort, poétique et une pièce menée par des comédiens talentueux. A voir absolument au théâtre de Poche.
La ménagerie de verre de Tennessee Williams
Au Théâtre du Poche-Montparnasse
Mise en scène par Charlotte Rondelez
Avec : Cristiana REALI, Ophelia KOLB, Charles TEMPLON, Félix BEAUPERIN